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Théobald : l'art de relier !
La peinture de Théobald n’est pas très loin de l’abstraction, mais il est encore de ceux qui convoquent le monde sous nos yeux.

Peinture de paysage ? Cette expression renvoie à des images aux contours trop précis pour bien convenir. Il faudrait parler plutôt, le concernant, de paysages d’âmes. Une conscience est là, face au monde, et attirée par lui. On pénètre dans un territoire intérieur.

Ces paysages offerts remontent de très loin, de ce qui aurait pu demeurer enfoui en soi: une mémoire intime, familiale, géographique - l’Alsace du nord,- qui constitue le fond de l’être. Il ressort souvent de ces « vues » / « visions », un appel des lointains, immémorial : « Homme, où es-tu ? »

Que voit-on ? Presque toujours des montagnes douces, dont l’artiste aime souligner les formes, par des lignes, noires, rouges, qui traversent le paysage, mis en flux. On voit encore le ciel, beaucoup de ciel, clair ou bien noir, orageux. Les nuages, masses compactes et mouvantes. Des champs, d’herbe verte ou de terre lourde, sombre. De vastes étendues de terre. La terre qui nourrit l’homme. La terre de laquelle l’homme a été tiré et à laquelle il revient. Le passage des saisons : la neige parfois, et parfois des visions plus claires, printanières, évanescentes, comme encore éblouies par la beauté du monde.

Théobald Diebolt                 

Theobald

  du 02/04/25 au 02/11/25

Le point commun que l’on peut trouver entre toutes ces œuvres est : la ligne d’horizon. Comme une hantise. Jamais le paysage ne se ferme. Il est là, devant nous, comme une proposition à entrer, dans l’espace ouvert. D’ailleurs Théobald affirme : « Quand je perds l’horizon, souvent ma série s’arrête. »
 
Théobald va vers le nu du monde. Il le représente toujours sans les hommes. La philosophe Simone Weil disait : « Voir un paysage tel qu’il est quand je n’y suis pas. » L’homme n’est jamais là.
 
Précisons : l’homme n’est jamais représenté, mais on peut discerner une présence indirecte de l’être humain, par des signes. Il peut s’agir d’un mot, de la Bible, de l’hébreu. Le mot, souvent placé au-dessus du paysage, dans le ciel, délicatement écrit, et toujours mystérieux. Que vient-il nous dire ?
 
Je pense à cette pratique singulière de l’écrivain Julien Gracq, qui parsemait ses textes de mots en italiques, pour solliciter l’attention du lecteur, et aussi, pour maintenir une tension continue dans le texte, comme un courant électrique qui le traverserait. Il y a sans doute aussi quelque chose de cela, dans la peinture de Théobald : un maintien de l’œil sous tension.
 
Je relève d’autres signes de la présence humaine, comme la clôture, intervention de l’homme dans le paysage, ou le barbelé, qui renverrait aux drames de l’Histoire : la Seconde Guerre Mondiale ; les « malgré-nous » ; la Shoah. Ces signes marquent le paysage, comme des cicatrices. Le monde est ainsi convoqué, à la fois dans sa beauté, et dans son malheur, qui est suggéré.
 
Comment cette peinture advient-elle ?
Théobald déclare : « Je n’ai aucune rigueur. J’ai une palette, je la vide ! » Sa peinture est en partie liée à ce que veut le peintre, et en partie aussi, à l’accident, donc à ce qui advient, et qui n’était pas attendu, mais est accueilli. Il est arrivé, par exemple, que des craquelures apparaissent ultérieurement dans l’œuvre, et elles sont admises comme en faisant partie.
 
Théobald peint rarement sur toile et plutôt sur bois, carton, papier marouflé sur panneaux. Il n’emploie que peu l’acrylique, mais essentiellement la peinture à l’huile, préparée, diluée, avec l’ajout d’autres choses, graphite, pigments, brou de noie, aérosol, terre … Il procède par séries, ce qu’il relie à son goût des archives.
 
Il passe dans toute sa pratique, quelque chose de l’ordre de l’artisanat. Il a le goût des matériaux simples, brutes. Sans compter qu’il est, de manière effective, un artisan relieur : les 66 livres exposés (chiffre à relier au nombre de livres contenus dans la Bible protestante), témoignent de cette pratique, versant complémentaire de son travail.
 
Théobald réconcilie donc pleinement les deux fonctions d’artiste et d’artisan. Comment ne pas établir, ici, le lien entre le terme qui désigne la profession de l’artiste : « relieur » et le verbe « relier ». Si relier ses diverses activités est un objectif personnel que Théobald trouve difficile à atteindre, par contre, ce besoin s’affirme pleinement dans son travail. Oui : il nous relie ; il est bien un « relieur » !
 
Si l’on pose la question des sources d’inspiration, il en est deux qui sont avouées par lui : il s’agit d’abord d’Anselm Kiefer, artiste contemporain majeur (né en 1945) et des paysages de Egon Schiele (1890-1918). S’il y a écho, il y a bien, également, écart, entre lui et eux.
 
Les couleurs dominantes sont plutôt froides, même si le peintre peut faire éclater la couleur. La paix semble être gagnée sur une menace. C’est parce qu’il y a une violence vaincue que l’on perçoit la douceur. Comme après un orage, un combat. Cette peinture met en résonance, discrète, les forces telluriques et la mémoire douloureuse des hommes.
 
Ce n’est pas une peinture intellectuelle, symbolique, ayant besoin de mots pour s’expliquer, c’est une peinture qui touche, de manière immédiate. Elle saisit. Elle impacte la sensibilité par sa force expressive, et j’ose dire, par sa beauté, car Théobald n’a pas renoncé à l’esthétique.
 
Théobald nous propose un « chant du monde », à la fois triste et beau, doux et douloureux, lointain et proche, puissant comme un grondement d’orage, et pourtant consolateur.
 
Si la voix lointaine dit : « Où es-tu ? » le peintre, dans ses œuvres, répond : je suis là, non pas dans ces mots mais dans ce que vous voyez.
 
Jean-Michel BLOCH 
 
 
Formations de Pierre Diebolt
BAC STI Arts Appliqués en 2000
CEAP (certificat d’études d’arts plastiques) à l’ENSA de Dijon, en 2003
CAP art de la reliure, passé en 2011
 
Pierre Diebolt exerce le métier de relieur à Fougerolles (département de la Haute-Saône)
 
https://dprelieur.com
Insta @dprelieur
@theobalddie

Lucien Jung - Portraits                                               

Lucien

Lucien Jung est né le 8 octobre 1936 à Schiltigheim, en Alsace. Il s’est très vite intéressé à la peinture. En 1953, au vu de ses premières œuvres, le Dr Ernest Wickersheimer, neveu et exécuteur testamentaire d’Emile Stahl, le prend sous sa protection. Il lui offre de travailler dans l’atelier de Stahl et dans leur parc.

Lucien obtient le brevet de compagnon en 1957 et sort brillamment diplômé de l'École des arts décoratifs de Strasbourg en 1958, malgré un certain absentéisme.

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A 27 ans il a déjà peint plus de 500 toiles. À cette époque, il rencontre Claire qu’il épouse en 1965 ; ensemble, ils s’installent à Schiltigheim dans un appartement qu’ils ne quitteront plus.

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Lucien a enseigné au lycée de Saint-Louis, dans le Haut-Rhin, où il fut fort apprécié de tous - élèves, collègues et encadrement. Il donnera, en 1964, une exposition fort remarquée dans cette ville. Suite à des ingérences du petit monde de l’art, où son humanisme lui valait quelques inimitiés, il quitta l’éducation nationale en 1968.

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Il se consacra alors entièrement à son art ; c’est une période de forte production et de nombreuses expositions, ne citons que plusieurs expositions au Grand palais à Paris, et une autre, très remarquée, en 1971, au centre culturel de Berlin, où, avec Claire, ils furent reçus comme des chefs d’état.

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En mai 1973 il est victime d’un accident de la route : un coup du lapin bloquera sa nuque et sa verve artistique avec, à la clef, un procès interminable. Il se lance alors dans des recherches sur différents peintres et sur leurs œuvres.

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En novembre 1993, une rétrospective agrémentée de nouvelles toiles dont un portrait magistral de son ami Tomi Ungerer, fête sa renaissance à Molsheim au grand dam de ses détracteurs. Il se remet à peindre avec plus de fougue, mais un nouvel accident freine ce retour en 1995.

 

En 2006, une grande exposition à l'Hôtel de Ville de Strasbourg organisée par son ami A. Peter sera l’occasion de l’édition par BF éditions d’un petit livre: Lucien JUNG, le portrait et le livre.

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Il continuera à peindre, à un rythme moins soutenu mais des toiles importantes, jusqu’à la fin de sa vie le 29 mai 2012.

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Contact : Association "Les Amis de Lucien et Claire JUNG"

20 rue de la division Leclerc 67170 Brumath

Mail : cllucienjung@gmail.com

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Rue du Stade - 57230 Schorbach

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